La peinture chez André Lemaitre a été autant une œuvre d’instinct qu’une méditation sur son art. Nourri d’une forte érudition, acquise par la lecture et les visites d’exposition, puisant chez les Anciens l’enseignement des Grands Maîtres, le peintre de Cesny a livré au travers de quelques réflexions une conception éclairée de son métier.
La personnalité : « En peinture, il y a des connaissances techniques qu’il est bon de savoir, mais la personnalité ne s’apprend pas. »
La technique : « Le moyen qui semble le plus facile est le trait. C’est déjà une abstraction et un parti-pris. Il n’y a pas de lignes dans la nature. Il y a des volumes et c’est l’air qui sépare ces volumes et la lumière qui donne les volumes. Le vrai dessin est donc celui qui tient compte de l’environnement en ne séparant pas le motif de ce qu’il y a devant, derrière et sur les côtés. »
Le dessin : « J’ai toujours beaucoup dessiné, surtout à une certaine époque, mais je considère les dessins comme des balbutiements, des confidences qui, à la limite, ne sont pas faits pour être montrés. »
La méditation : « Dans ma peinture, il y a toujours une grande part de pensée. Je dirais que c’est plus médité qu’on ne le croit. C’est une peinture voulue. Ça paraît statique, mais ça ne l’est pas. Ça bout à l’intérieur. Je crois savoir domestiquer tout cela. Comme je suis un type assez direct, ça commence par des gestes ; ça frise quelquefois la peinture gestuelle. Puis, tout s’ordonne ; je cesse d’être direct pour être méditatif. »
Les saisons : « Pour les saisons, j’ai souvent choisi celle qui dépouille le plus le paysage de ses attraits faciles pour ne garder que l’aspect construit, sévère et riche à la fois, qui laisse lire les structures du motif et qui dépouille les arbres, c’est-à-dire l’hiver. »
Condé-sur-Ifs : « Ce qui me séduisait surtout, c’était l’aspect géographique du site et le côté constructif des maisons. Tout ça correspond très bien à un certain héritage anti-impressionniste. Tout est simple : des verticales et des horizontales. Avec ça, on fait un tableau tout de suite. »
La nature morte : « A l’atelier, je peins la même table et les mêmes objets depuis une éternité, car le problème qui se pose à moi n’est pas la reproduction des objets – souvent bien quelconques -mais le problème plastique que je veux résoudre. »
Les brosses : « L’emploi de la grosse brosse, c’est venu petit à petit, parce que j’étais pressé de l’effet. Quand on peint un paysage, ça ne dure pas l’effet ; alors, on met des petites taches partout, comme faisaient les impressionnistes. Tandis que moi, avec mon gros pinceau, je résume ça en quelques gestes. »
L’aquarelle : « Je me suis inventé une technique d’aquarelle qui est bien de moi, c’est-à-dire la fluidité et la rapidité d’exécution. Car pour moi, l’aquarelle c’est suggérer bien plus que montrer. Puisqu’on ne peut pas rivaliser avec la peinture, pour faire quelque chose de costaud et de solide, j’ai donc choisi la voie contraire, la voie du fluide. Alors je vais très vite avec un gros pinceau. »